vendredi 10 janvier 2014

L'insoutenable légèreté de l'amour

 

En 1982, Milan Kundera a écrit l'un des mes ouvrages préférés : L'insoutenable légèreté de l'être.
Vous en avez sans doute entendu parler, ce livre est très connu et constitue souvent le livre préféré de beaucoup de personnes (paie ton originalité matchachocolat). Comme je l'aime beaucoup, je n'ai pas regardé le film par peur d'être déçue et je ne suis pas fan de Juliette Binoche.

Milan Kundera écrit: « L’amour ne se manifeste pas par le désir de faire l’amour (ce désir s’applique à une innombrable multitude de femmes) mais par le désir du sommeil partagé (ce désir-là ne concerne qu’une seule femme). » 

Cette phrase m'a profondément marqué car j'ai réalisé à quel point c'était vrai et à quel point le désir prime sur le désir d'amour.
Dans le cadre du livre, il s'agit là de Tomas, être ambiguë et quelque peu perdu dans ses désirs et de Tereza, amoureuse de Tomas et qui doit composer avec la dualité de cet être aimé et ses infidélités.

Photo de Helmut Newton
 
« Une fois ne compte pas, une fois c'est jamais. Ne pouvoir vivre qu'une vie, c'est comme ne pas vivre du tout. »

L'insoutenable légèreté de l'être questionne la vie en elle-même, et comme on a qu'une vie, autant en profiter un maximum. Et c'est là que je ne peux m'empêcher de penser à ce qui m'entoure : l'absence de volonté des hommes (et aussi de quelques femmes) de s'engager, sous prétexte qu'ils veulent s'amuser, en profiter et pour les plus délicats « se taper le plus de meufs possible ». Sur la blogosphère, on peut compter par millions la retombée de ce type d'histoires.

On va passer sur les débats et explications potentielles de la différence homme/femme en matière de sexe. Je ne condamne pas les gens qui veulent vivre comme cela, du moment que tout est clair. Mais moi, ce que je me demande, c'est où est passé le respect de l'Autre ? Où est passé la capacité de pouvoir assumer, tout simplement ?

La banalisation de la légèreté des moeurs

« Tu devrais te taper un mec, juste pour une nuit et ne pas demander plus ». J'ai un peu de mal quand je vois que beaucoup ne comprennent pas, que non la légèreté des moeurs ne fera pas de toi une fille plus in, trop libérée et trop cool. Et que non, aspirer à une relation saine, de couple, basée sur le respect mutuel ne fait pas de toi une bonne sœur revêche. Un de mes amis m'a dit une fois « tu es conservatrice en amour» et ça sonnait dans sa bouche comme une profonde critique. Depuis quand c'est mal de vouloir une relation sur la durée?

Ce n'est pas tant ce refus de s'engager et cette volonté d'une aventure nocturne qui me choque, c'est le vocabulaire employé pour parler des femmes et les critères qu'ils ont défini. Je te prends en CDD, sans période d'essai, parce que tu vois le CDI ça suppose de s'engager et ça j'ai pas envie.

Parce qu'avouons-le, ceux qui prônent ce mode de vie, ne sont pas franchement des apollons. Ils parlent des femmes comme un vulgaire morceau de viande seulement nécessaire à leurs pulsions, qu'on prend le temps d'une nuit et qu'on jette le lendemain pour passer à la suivante. Elles ne se résument qu'à « elle est bonne, je prends », « elle est moche, je passe ». On est pas chez le boucher les mecs.

Mais, est ce qu'ils se sont bien regardés ?
Parce que quand on regarde plus attentivement, il y a bien plus souvent plus de jolies femmes que de beaux mecs. L'un de mes amis a une fois dit « Non mais une fille belle, c'est normal, y'en a plein, c'est même plus un critère, c'est la base ». Il faut qu'elle soit en plus intelligente, drôle, pas chiante, sportive, sexy etc..

Wait. What??
Et du côté des nanas, on a quoi nous? Ben pas grand chose. Alors forcément je crois qu'on se rabat sur qu'il y a, et ce qu'il y a, c'est pas franchement top. La balance de l'offre et de la demande ne pèse pas en faveur des femmes.



La banalité de ce procédé s'est imposée dans notre société et les filles en ont accepté les règles du jeu avec l'espoir qu'avec elle « ça sera pas pareil », qu'elle « le fera changer », toujours à la conquête du « celui-là il est différent des autres ». Pour déchanter quelque temps plus tard et rester sur le carreau. Combien d'amies j'ai vu dans cet état-là.

De nombreux sociologues se sont penchés sur la question du couple de nos jours, du concept de l'amour. Le couple est censé libérer, permettre de s'accomplir tout en restant autonome. Ca relaie l'image que l'on veut donner de soi aux autres. Aujourd'hui on veut réussir son couple comme on réussit sa carrière professionnelle. L'échec n'est plus permis.
Si ça ne marche pas avec cette fille, c'est pas grave, next, y'en a des tonnes derrière. Facebook, les bars, les potes, les sites de rencontres, c'est plus trop dur de trouver la suivante.
On compare, on teste, on jette. On consomme l'Autre, comme on consomme n'importe quel autre produit. Exit l'Iphone 4, on passe à l'Iphone 5. Bonjour société de consommation relationnelle. Mon « moi » prime avant le « nous ».

Si l'Autre ne correspond pas à notre idéal, alors il dégage. On peut trouver mieux. On ne fait pas de concessions, c'est trop dur, ça prend du temps, ça prend la tête et pourquoi s'emmerder quand il y a tant de choix ? Je finirais bien par tomber sur la bonne, sans trop d'efforts.

Il y a du choix, certes. Mais cette entente si particulière qui donne envie de rester plus d'une nuit et de partager son sommeil, ne se trouve pas tous les jours. Et quand on a la chance de tomber dessus, on devrait y prêter plus d'attention La perfection n'existe pas. Cette entente demande parfois des compromis et de faire une croix sur ces illusions qui n'existent que dans leur imaginaire de mâle. Ca suggère de vouloir s'abandonner, d'accepter cette plongée dans l'inconnu et d'arrêter de vouloir tout contrôler. Mais ça, ils l'ont un peu perdu de vue.

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